Rikard Sjöblom a beau partager son temps entre ses trois formations, soit Beardfish, Gungfly et Bootcut, il est tout de même parvenu à concocter The Unbendable Sleep, son second essai solo... et de s'entretenir avec Terra Incognita de ce nouvel essai ainsi que de ses autres projets.
T.I. Quelle a été votre principale motivation pour enregistrer ce disque solo? Est-ce parce que ces nouvelles compositions ne correspondaient pas au son de Beardfish?
R.S.: Je dirais à la fois oui et non. Certaines de ces chansons ne sont peut-être pas dans le style de Beardfish mais d'un autre côté nous aimons bien jouer plusieurs styles musicaux différents. Je pense que la raison principale est que j'aime vraiment, vraiment beaucoup enregistrer seul. Depuis Gungfly à peu près tout ce que j'ai fait tourne autour d'activités de groupes. Je voulais de nouveau enregistrer un album où je pouvais faire exactement ce que je voulais.
T.I.: Quelle est pour vous la différence la plus notable entre votre premier essai solo Cyklonmannen (2006) et The Unbendable Sleep?
R.S.: Premièrement Cyklonmannen est une interprétation instrumentale d'une nouvelle écrite par Sture Dahlström et...The Unbendable Sleep n'est pas une interprétation musicale d'une nouvelle. Haha! Bon, plus sérieusement, sur le plan musical j'ai toujours apprécié Cyklonmannen parce que je trouve que c'est un disque honnête et terre-à terre. Et ce même si ma performance en tant que musicien n'est pas toujours à la hauteur. Le disque a été enregistré en 2003 mais lancé en 2006. J'ai fait tellement de choses depuis et, musicalement, je suis rendu ailleurs aujourd'hui. Je pense que j'ai élargi ma vision de la musique en général et que j'ai assez de connaissances pour amener mes chansons beaucoup plus loin et ce même lorsque j'enregistre plus ou moins seul.
T.I.: Tu as effectivement enregistré The Unbendable Sleep en bonne partie seul. Est-ce facile pour toi de travailler sans avoir de commentaires d'autres «oreilles»?
R.S.: Oui, j'ai toujours beaucoup apprécié le processus d'enregistrer un instrument à la fois. C'est une façon de voir une chanson naître pièce par pièce, piste par piste. J'ai aussi eu un peu d'aide de la part de mes amis qui ont joué sur quelques pièces. Je n'étais donc pas complètement seul tout le temps!
T.I.: Peux-tu nous parler de ces musiciens qui ont contribué à The Unbendable Sleep?
R.S.: En tout premier lieu on retrouve Petter Diamant, le batteur de Bootcut et Gungfly qui joue sur quatre pièces. De tous les musiciens avec qui je travaille c'est celui avec qui je joue depuis le plus longtemps. C'est un batteur incroyable mais aussi un grand ami. Baron Bane a aussi contribué tout comme Rasmus, le frère de Petter, avec qui je joue depuis presque aussi longtemps que Petter. Rasmus joue de la basse sur deux pièces de l'album. Petter, Rasmus et moi avons travaillé ensemble sur différents projets et nous avons joué pour différents artistes suédois dont Clara Mae, Linda Varg et Ulf Nilsson et évidemment nous jouons ensemble dans Gungfly. Ce sont aussi d'excellents réalisateurs et l'année dernière nous avons enregistré un album de Gungfly ensemble. Nous avons tous étroitement collaboré à ce disque. Ce disque devrait être lancé sous peu. Du moins je l'espère! On retrouve aussi sur The Unbendable Sleep un nom familier pour ceux qui me connaissent par le biais de Beardfish. Il s'agit de Robert Hansen qui joue de la basse sur la pièce «Love and War Part Two:Lucky Star». J'ai pensé que la chanson lui irait comme un gant et je lui aie demandé s'il voulait contribuer.
T.I.: Dès la première écoute on sent que ce disque sonne très années 70. Était-ce un choix conscient de ta part?
R.S.: Ça l'est effectivement. Même jusque dans le mixage et le choix des instruments. Je ne voulais que mon disque sonne trop moderne même si on y retrouve quelques pièces à saveur pop. J'aime beaucoup vivre dans le passé lorsque vient le temps de réaliser!
T.I. Certaines chansons m'apparaissent un peu comme un hommage. Je pense notamment à Love and War Part 1 qui me rappelle The Who alors que pour d'autres ce sont seulement certains moments qui évoquent d'autres artistes. Notamment «Realm of You and Me» avec ses parfums des Beatles où certains éléments de Rhyme and Reason qui me rappellent Crosby Stills Nash and Young. Qu'en penses-tu?
R.S.: Cela ne me dérange pas. Je pense que tout le monde entend ce qu'il entend et j'ai déjà eu plusieurs choix différents «d'inspirations» de la part de gens qui ont déjà écouté le disque. Mais tu es le premier à me mentionner The Beatles et CSNY et j'aime vraiment beaucoup ces deux groupes. Merci beaucoup! En ce qui concerne The Who c'est ce que j'ai moi-même pensé lorsque j'ai écouté la pièce pour la première fois après avoir enregistré le chant. Haha! J'ai toujours beaucoup aimé The Who et j'écoute tellement de musique que lorsque j'aime vraiment quelque chose cela peut tout aussi bien ressortir dans mes propres chansons. Espérons que je n'ai rien volé.....
T.I.: Parlant de Love and War Part 1 est-ce bien du ARP Odyssey que j'entend sur cette pièce?
R.S.: Tu as tout à fait raison! Lorsque j'ai vu que Korg relançait le ARP Odyssey j'en ai très rapidement acheté un! Nous en avons utilisé un lors de plusieurs enregistrements de Beardfish et j'adore littéralement ce synthétiseur. Il était donc temps que je m'en achète un. Pour Love and Wart Part1 j'ai enregistré une piste MIDI que j'ai passée par l'Odyssey et j'ai contrôlé les filtres presque tout au long de la pièce sauf à la fin où il capote, ha ha!
T.I.: Under Northern Skies est une de mes pièces préférées pour ne pas dire ma préférée. J'adore, entre autres, le solo de guitare.
R.S.: Je te remercie! Je suis content que tu l'apprécies. C'est une des premières chansons que j'ai composée en 2014 pour mon disque. Elle m'est arrivée tout simplement un jour alors que j'étais au parc avec ma fille Villemo. Je la regardais simplement jouer et j'étais très envieux de sa vision du monde à la fois simple et terre-à-terre. Le monde est un endroit incroyable et plein d'aventures lorsque tu es un enfant. J'avais l'impression de m'en rappeler! J'ai donc voulu écrire une chanson avec sa perspective. Les paroles viennent en partie d'elle. Elle devrait avoir des royautés et d'une certaine façon je pense qu'elle les aura... Musicalement j'écoutais beaucoup de XTC durant cette période et pour une raison que j'ignore j'ai pensé qu'un long solo de guitare conviendrait bien à cette section plus tranquille. J'y suis donc allé pour cela. Je l'ai enregistré en une couple d'essais et c'était parfait.
T.I.: «Building a Tent for Astor« est une pièce très spéciale. Tu utilises de l'accordéon pour cette pièce instrumentale. En l'écoutant on peut l'imaginer intégrée à la trame sonore d'un film français mélancolique!
R.S.: Dans les faits je l'ai composée pour la trame sonore d'une présentation d'un court métrage pour un théâtre de ma ville. L'organisation possède une tente qu'elle est en mesure de monter très rapidement pour présenter des pièces de théâtre. Un des responsables m'a demandé si je pouvais composer une chanson. Je travaillais sur cette pièce inspirée par Astor Piazzola et ce même évidemment s'il jouait du bandoneon. J'ai donc joué la mélodie à l'accordéon et c'est vrai que finalement la pièce est devenue «très française» plutôt qu'Argentine. Mais bon, de toute façon, j'ai décidé de l'intituler Building a Tent For Astor.
T.I.: Penses-tu présenter les pièces de The Unbendable Sleep sur scène? Et si oui avec quels musiciens?
R.S.: Je veux vraiment jouer ces pièces en concert mais je ne veux pas «m'enfermer» en montant un nouveau groupe. Si possible j'aimerais avoir tout le temps les mêmes musiciens avec moi mais malheureusement ce n'est pas toujours possible... Je vais probablement aussi présenter quelques concerts solo. Seulement moi au chant, au piano et à la voix. Les musiciens de Gungfly et de Beardfish sont les musiciens qui ont le plus de chance d'être impliqués dans ce projet.
T.I.: Est-ce que vous avez commencé à travailler sur le prochain disque de Beardfish?
Oh oui. J'ai composé pas mal de nouvelles chansons et nous allons probablement commencer à enregistrer cet été. Nous planifions aussi de présenter quelques concerts bientôt!
T.I.: Quelle est l'histoire derrière ta collaboration avec la formation britannique Big Big Train?
R.S.: J'ai été contacté parce que, après une absence de la scène de près de 17 ans, les gars voulaient recommencer à présenter des concerts. Ils avaient besoin de quelqu'un en mesure de jouer de la guitare et des claviers et aussi d'agir comme choriste. L'idée était de répéter pendant une semaine de l'automne 2014 dans les studios Real World de Peter Gabriel en Angleterre et de filmer entièrement cette aventure pour la réalisation d'un DVD qui sera lancé en mars mais uniquement en Blu-Ray. J'ai été recommandé par l'ingénieur de son Rob Aubrey qui était technicien et gérant de tournée pour Spock's Beard lorsque nous avons fait une tournée avec le groupe en 2013. Je lui en suis très reconnaissant parce que j'aime ce groupe et sa musique. C'était énorme comme commande d'apprendre toutes ces pièces mais cela en valait amplement la peine! Nous avons présenté trois concerts à guichet fermé à The King's Place à Londres en septembre 2015 et c'était tout simplement fantastique.
T.I.: Maintenant que ton disque solo est lancé est-ce que tu as d'autres projets en route?
R.S.: Au printemps nous allons lancer un nouvel album de mon plus vieux groupe. C'est-à-dire Bootcut, mon duo orgue batterie. Présentement je suis en train d'enregistrer mes parties pour le prochain disque de Big Big Train qui aura pour titre «Folklore». Je n'ai aucun doute que ce sera un excellent disque. À part de cela, comme je le disais tantôt nous travaillons sur le prochain Beardfish qui s'annonce lui aussi excellent!