Soyuz

Vilbo (guitares), Thomas Andersen (claviers), Mikael Krømer (violon, mandoline, guitares), Kristian Torp (basse) et Robert Risberget Johansen (batterie, percussions), soit le même personnel depuis 10 ans, à l'exception du batteur qui remplace Lars Erik Asp, parti l'an dernier ; le groupe est aussi épaulé par Kristian Skedsmo (banjos ?). Mais avant de passer à la musique, un peu d'histoire... Soyouz 1 était une capsule spatiale habitée lancée par l'U.R.S.S. en avril 1967 qui connut des problèmes dès sa mise en orbite et s'écrasa le lendemain sur Terre, tuant le colonel Vladimir Komarov. Comme ce dernier savait dès le départ que sa mission était vouée à l'échec (200 problèmes identifiés par les ingénieurs avant le lancement furent ignorés par les autorités soviétiques qui voulaient à tout prix damer le pion au programme Apollo des États-Unis), cette tragédie moderne devient, pour GAZPACHO, une métaphore de l'impossible arrêt du temps, concept que l'album explore à travers huit chansons. D'une durée totale de 47 min 57 sec, les chansons de Soyuz relèvent toutes de la « deuxième manière » de GAZPACHO amorcée avec Missa Atropos (2010), c'est-à-dire qu'elles sont plutôt de courte durée : cinq des huit chansons durent 3 à 4 min 30 sec, alors que les trois autres affichent 6:22, 7:43 et 13:23. Quoique la longueur des pièces ne soit pas un critère de qualité en soi, il reste que ce que la musique peut développer en variété et en intensité, elle le perd en ampleur. Outre cette « restriction » délibérée des compositions, je note aussi que la voix de Ohme a changé ; il ne semble pas que ce soit à cause de la maladie ou de l'âge, mais il a délaissé des inflexions, des modulations qui, à mon sens, constituaient le trait caractéristique même de sa voix.
Dans l'ensemble, la musique est riche, moderne (le violon tient un rôle particulier à cet effet) et, parfois, même expérimentale dans certains passages (« Exit Suite », « Sky Burial », « Soyuz Out ») qui sont, d'ailleurs, ceux qui illustrent peut-être le mieux – appuyés en cela par le chant de Ohme – la prédisposition des Norvégiens pour le «doom and gloom». Le tempo général étant plutôt lent tout au long de l'album, la palette musicale puise dans des styles vocaux qui empruntent notamment au lamento (« Rappaccini »), à la ballade folklorique, classique ou pop (« Emperor Bespoke ») et aux atmosphères quasi monocordes du post-rock (« Soyuz One », « Fleeting Things »). Quoique « Hypomania » soit la piste la plus rythmée de l'album, la voix un peu « off » de Ohme en tempère le dynamisme au profit d'une direction légèrement confuse, surtout en finale.
Cela étant, Soyuz est un album tout à fait recommandable, même s'il n'atteint pas les sommets des albums précédents.
Liste des pièces
1. Soyuz One (6:22)
2. Hypomania (3:44)
3. Exit Suite (3:40)
4. Emperor Bespoke (7:49)
5. Sky Burial (4:24)
6. Fleeting Things (4:24)
7. Soyuz Out (13:26)
8. Rappaccini (4:08)