Illusioni

Fondé en 2010 et issu de la jeune génération de musiciens italiens de rock progressif, QUARTO VUOTO se compose d'Edoardo Ceron (basse), Luca Volonnino (guitares), Mattia Scomparin (claviers) et Nicola D'Amico (batterie, percussions) et des invités Giulio Dalla Mora (saxophone) et Mauro Spinazzè (violon). À 49 min 7 sec (six pièces), Illusioni est le premier disque longue durée du groupe. Étant entièrement instrumental, c'est dire que QUARTO VUOTO n'a pas choisi la voie facile... mais néanmoins celle qui révèle le plus son talent et sa force créatrice. En outre, pas de RPI à l'ancienne ici, mais plutôt un groupe en train de se forger une identité musicale absolument contemporaine.
Ainsi, « Nei Colori del Silenzio » (5:31) relève d'un post-rock rêveur que déploient les claviers comme un lent travelling dans un paysage hors du temps ; ce qui aurait pu être monotone est illuminé par des éclats de guitare cristallins. « Coscienza Sopita » (6:50) est plus énergique et texturé, mais il subsiste néanmoins une sorte de langueur durant la première minute, puis le tempo s'accélère, les instruments haussent le ton. Tout en étant mélodique, le résultat est hachuré, saccadé, les instruments s'affrontent, puis dérivent vers un jazz rock / fusion un peu expérimental (on peut penser à Steven WILSON). « Impasse » (11:31) débute dans une veine électronique assez semblable à « Nei Colori... », mais la section rythmique rompt assez tôt l'effet miroir ; d'ailleurs, la batterie de D'Amico est l'instrument central tout au long de la pièce (ce qui est peu usité de nos jours). La mélodie de départ réapparaît plus tard, jouée plus rapidement et, aussi, d'une façon moins amortie. « Apofis » (11:03) démarre en puissance sinueuse et sonorités « sales », allégées à peine par le piano : une course folle vers une catastrophe anticipée qui, soudain, est suspendue dans le temps, bloquée sur image, par une trame de batterie sèche et de guitare liquide. Puis le saxophone s'invite dans le décor, comme une alarme, une plainte, un souvenir ou un ultime cri qui crache des flammes. Le cœur du morceau, à la fois dense, fébrile et percussif, rappelle KING CRIMSON... jusqu'à ce qu'il débouche sur un merveilleux solo de piano que ne renierait pas Keith JARRETT. D'entrée de jeu, l'ambiance de « Due°Io » (9:15) est très électronique : un univers psychédélique évoquant celui des débuts de PINK FLOYD. À la troisième minute, rupture, accélération, hausse du volume, mais le rythme de départ demeure en fond (comme celui du Boléro de Ravel) malgré les flambées de guitare. Puis nouvelle plongée dans l'espace sidéral ou les abysses de quelque planète océanique... et, toujours, le rôle essentiel de D'Amico qui propulse les autres instruments dans des acrobaties de plus en plus exigeantes jusqu'à l'accalmie finale. Pièce la plus courte de l'album, « Tornerò » (4:57) s'amorce aussi dans une aire hybride de post-rock et d'électronica, mais c'est le violon qui lui donne sa personnalité propre en larguant une mélodie qui se gonfle d'air liquide que traversent des fulgurances électriques. « Tornerò » réussit à renverser l'abattement sombre qui envahissait les pièces antérieures et livre un message lumineux, dynamique, comme un papillon parvenu à s'extraire de son cocon.
QUARTO VUOTO démontre sans l'ombre d'un doute que ses membres sont d'excellents musiciens et que les compositions sont solides et originales (en dépit des influences possibles citées). Il reste maintenant à espérer que Illusioni ne sera pas le seul témoignagne du groupe.
Liste des pièces
1. Nei colori del silenzio (5:31)
2. Coscienza sopita (6:50)
3. Impasse (11:31)
4. Apofis (11:03)
5. Due°Io (9:15)
6. Tornerò (4:57)