Il y a belle lurette qu'on n'a pas entendu parler de Anekdoten. Contrairement à certain de ses confrères ce groupe suédois n'est pas particulièrement prolifique. Son dernier essai en date, «A Time of Day» remonte à 2007. Près de huit ans (déjà!) en fait.
Partie 1 : Entrevue avec Jan Erik Liljeström
T.I.: Est ce que ce nouvel album va être dans la veine de «A Time of Day»?
J.E.L.: Pas vraiment. C'est quelque chose de surprenant mais je pense que ça va être notre disque le plus progressif et le plus heavy depuis «Nucleus». Pour une des pièces la batterie a été enregistrée en cinq parties dans le studio et c'est de loin la pièce la plus exigeante que nous avons jamais enregistrée. Bien qu'il y ait aussi plusieurs parties qui s'enchaînent très bien ensemble. Il y a deux valses sur ce disque et ces deux pièces sont les plus tranquilles de cette nouvelle fournée mais il y a aussi des moments intenses. Ce sera donc un disque qui nécessitera une écoute attentive. Nous avons aussi plus d'invités que jamais. Theo Travis (Steve Wilson, The Tangent) a enregistré deux merveilleuses interventions à la flûte, Per Wiberg (ex Opeth) se mesure à Nicklas dans un duel de solo, orgue versus guitare, Marty Willson-Piper (The Church) joue de la guitare électrique et acoustique et un autre de nos amis Gustav Nygren a été invité à jouer du saxophone. Ce disque sonne définitivement comme un disque de Anekdoten mais il a été façonné pour les grands amoureux de musique et non pas pour l'auditeur fortuit.
T.I.: Marty Willson-Piper!? Il y a quelques jours à peine j'écoutais «After Everything Now This» de The Church ainsi que son disque solo «Nightjar». De quelle façon l'avez-vous connu?
J.E.L.: C'est cool comme coïncidence! Eh bien depuis plusieurs années
Nicklas travaille dans une boutique de disques à Stockholm. Marty est un grand amateur de musique et il vit partiellement en Suède. Il y a quelques années il a rencontré Nicklas dans cette boutique et il a commencé à discuter de musique avec lui. Marty est finalement parti avec le disque solo de Nicklas (n.d.l.r. «El ultimo fin de semana» paru en 2011). Ils sont devenus amis et lorsque nous avons commencé à enregistrer notre disque Marty est venu nous aider pour quelques arrangements et il a fini par jouer de la guitare acoustique et électrique dont le solo sur la pièce titre de l'album.
T.I.: Et dans le cas de Theo Travis quelle est l'histoire derrière cette collaboration?
J.E.L.: Il y a une couple d'années Steven Wilson a fait écouter «From Within» à Theo et il a bien aimé ce qu'il a entendu. Theo nous a contactés pour nous dire que dans l'éventualité que nous présentions des concerts en Angleterre nous devions le contacter pour qu'il se joigne à nous sur scène pour une ou deux pièces. Ce n'est pas encore arrivé mais nous avons senti que deux pièces de notre album bénéficieraient de l'apport d'un véritable flûtiste et évidemment il était au sommet de notre liste des flûtistes que nous voulions inviter. Nous étions excités par le fait qu'il ne voulait pas seulement nous aider mais aussi le faire avec une telle musicalité et une telle implication.
T.I.: Sept années pour ne pas dire huit séparent «A Time of Day» de votre prochain disque. Avez-vous travaillé sur ce disque durant toute cette période?
J.E.L: Nous avons déjà pensé à jouer en concert une de ses chansons en 2009. Donc certaines des pièces ont été complétées il y a longtemps. Il y a en fait des idées de chansons qui remontent même à 1998. Habituellement nous nous rencontrons une fois par semaine dans notre studio de répétition. Quelques fois c'est pour répéter en prévision d'un concert mais la plupart du temps nous travaillons sur des pièces. Donc nous écrivons plus ou moins tout le temps mais souvent assez lentement. C'est notre façon habituelle de travailler.
T.I.: Avez-vous déjà un titre pour ce nouveau cd?
J.E.L.: Oui mais nous préférons le garder secret pour le moment. Nous en parlerons lorsque nous aurons une date officielle de lancement.
T.I.: Il y aura combien de pièces?
J.L.E.: Il y aura six pièces sur ce disque et en ce moment nous en avons quatre de mixées. On commence à voir la lumière au bout du tunnel.
T.I.: Est-ce que ces pièces ont un lien entre elles?
J.E.L.: Plusieurs d'entre elles abordent le thème de la mort d'une façon ou d'une autre. Je suis devenu père un mois après la parution de «A Time For Day». Avoir un enfant me rend plus sensible au passage du temps et à ma propre mort. C'est un genre de thème sous-jacent pour plusieurs pièces mais on ne peut pas parler d'album concept.
T.I.: J'imagine que ce nouvel album sera disponible en vinyle?
J.E.L.: Oui. Nous avons lancé «A Time of Day» il y a presque huit ans. Nous sommes donc aujourd'hui un peu dans l'obscurité en terme d'attentes pour les chiffres de vente. Mais déjà en 2007 nous avons constaté que le vinyle vend mieux que ce que nous avions expérimenté dans le passé. Nous avons toujours eu une version LP de nos disques parce que nous aimons le vinyle. Il va assurément y en avoir un. Mais les manufacturiers en Europe sont extrêmement occupés et c'est hyper compliqué d'avoir une place dans la chaîne de production. Lorsque tu reçois finalement les vinyles ils occupent beaucoup de place et c'est donc difficile pour nous de garder tous les items en stock.
T.I.: Vous avez formé Anekdoten au tout début des années 90. Bien des choses ont changé depuis. Selon vous quel serait le changement le plus significatif
J.E.L.: Nous avons toujours réalisé notre musique par nous-mêmes donc pour nous cela n'a pas vraiment changé. Mais, évidemment, si on parle de l'industrie c'est très différent et il y a de nombreux et nouveaux défis à relever. Le début des années 90 a été «l'âge d'or» pour la réalisation de rock progressif. Les cd ne coûtaient pas chers à manufacturer et avaient la cote. C'était facile de distribuer et de vendre. La compétition dans le monde du prog n'était pas dure comme elle l'est aujourd'hui et le calibre des musiciens n'était pas aussi élevé.
T.I.: Pensez-vous augmenter la cadence dans les années à venir?
J.E.L.: En tant que groupe ce n'est pas possible pour nous d'avoir le même genre de présence que nous avions dans les années 90. Ça nous a pris beaucoup de temps pour compléter ce disque et bien que ce soit toujours une passion le processus est un brin frustrant. En 2013 nous avions l'impression qu'il fallait qu'on se manifeste mais nous n'avions pas assez de chansons pour réaliser un album complet. Nous avons donc commencé à enregistrer quatre nouvelles chansons en mai 2013.Nous avons travaillé sur ces pièces le restant de l'année. Les répétitions ont recommencé en 2014 sur les deux autres pièces et en mai nous avons placé les pistes de base de ces chansons sur bandes et maintenant nous en avons presque terminé avec l'enregistrement. Comparativement à ce que nous avons fait dans le passé nous avons essayé de hausser la barre. Ce qui n'a pas facilité le processus mais je crois que nous allons finalement avoir dans nos mains un excellent album. Seulement pour cela je pense que ça en valait la peine
Parie 2 : Entrevue avec Nicklas Barker
Si Anekdoten est peu prolifique, Nicklas Barker lui a été un peu plus actif ces dernières années. Il fait partie du groupe psychédélique My Brother The Wind qui vient de lancer son troisième essai «Once There Was a Time When Space and Time Were Open» et le guitariste a aussi lancé son premier cd solo, la trame sonore du film espagnol «El ultimo fin de semana» (2011).
T.I.: Est-ce que le nouveau cd de My Brother The Wind se situe dans la veine de ses deux prédécesseurs?
N.B.: Nous avons suivi le même processus pour celui-ci. Le disque est enregistré live en studio et on utilise un vieux magnétophone Ampex 16 pistes qui date de 1969. Tout est improvisé et il n'y a aucune piste d'ajoutée par la suite. Il n'y a donc rien de différent dans le processus créatif mais le disque sonne un petit peu plus poétique que nos disques précédents. Nous l'avons aussi enregistré avec notre nouveau batteur Daniel qui a un style différent de celui de notre ancien batteur Tomas.
T.I..: Est-ce que vous avez d'autres projets dans le style de celui de la trame sonore du film «El ultimo fin de semana»?
N.B.: Pas vraiment. J'ai composé quelques courtes pièces pour le réalisateur de «El ultimo...» Des pièces dont il s'est servi pour de courts films. Il semble qu'il a un autre projet en vue mais je ne peux rien dire pour le moment.
T.I.: Avez-vous apprécié cette première expérience? Est-ce difficile de composer en regardant des images?
N.B.: J'ai eu beaucoup de plaisir! J'ai composé et enregistré la musique en regardant le film et en utilisant Pro Tools. C'était vraiment plaisant de créer la musique et les atmosphères en regardant les scènes. Le plus grand défi était de créer alors que je n'étais pas vraiment inspiré. Le réalisateur s'attendait à ce que j'envoie à chaque jour la musique pour deux ou trois scènes et ce sur une période de trois semaines. Un gros contrat. Il y a des jours où ça m'a pris beaucoup de discipline... et de café pour livrer la marchandise!