Vingt ans après la parution de leur tout premier album «Sliver of a Sun», les musiciens de IZZ qu’on a eu le bonheur de recevoir en mai dernier dans le cadre de la 15e édition du festival Terra Incognita, avaient le goût d’emprunter de nouvelles avenues lorsqu’ils se sont mis à travailler sur leur plus récent album «Don’t Panic».
Ils sentaient le besoin de «briser le moule» comme l’explique John Galgano en entrevue. Le bassiste, son frère Tom et leurs coéquipiers Greg DiMiceli et Brian Coralian ont bien voulu nous parler de ce neuvième album studio de la sympathique et talentueuse troupe new yorkaise.
D’entrée de jeu je serais vraiment tenté d’avancer que «Don’t Panic» est votre disque le plus progressif à ce jour. Qu’en pensez-vous?
John : Je crois savoir pourquoi tu dis cela. Je pense que c’est un disque qui musicalement est très aventureux. Dans le passé nous avons souvent composé pour nos albums plusieurs styles de chansons de durée normale. Nous aimons composer des chansons pop aussi mais pour cet album c’est la musique qui a été mis de l’avant. De ma point de vue personne j’ai tenté de sortir de mon mode traditionnel d’écriture. Donc oui je dirais que c’est probablement notre disque le plus progressif.
Greg : Je suis vraiment excité pour ceux qui vont écouter ce nouvel album de IZZ! La pièce «42» est définitivement une pièce prog avec ses entrelacements de thèmes et ses nombreuses sections variées. Mais je ne pense pas en terme de quel album peut être plus progressif qu’un autre. Je suis seulement heureux et reconnaissant que je puisse aider à créer un autre album avec un groupe de musiciens fabuleux que je connais depuis si longtemps et que je considère comme ma seconde famille. Et puis je suis aussi heureux de partager cette musique avec des gens qui l’écoutent qui s’y intéressent et qui l’apprécient.C’est tout simplement impressionnant et je suis heureux de pouvoir continuer à le faire.
Brian : «Don’t Panic» est un album réjouissant. Je pense qu’après avoir complété la trilogie de «Darkened Room», «Crush of Night» et «Everlasting Moment» nous nous sommes tous sentis un peu «libérés». Comprenez-moi bien j’aime ces albums mais nous sentions tous l’obligation de porter les thèmes et d’y rester fidèles. «Don’t Panic» nous a permis de créer simplement des chansons plaisantes que nous jouons avec plaisir. Je crois que les paroles de l’album livrent des messages importants mais cela ne découle pas d’une obligation. Certaines d’entre elles sont ludiques dans le sens que nous nous sommes permis de créer des pièces typiquement dans le style du rock progressif classique des années 70. Nous n’avons pas tenté de prendre une position, de faire une déclaration artistique ou de faire évoluer notre style. À mes oreilles c’est un album joyeux. Il y a toujours certaines influences modernes sur cet album mais globalement nous nous sommes fait plaisir et il en découle une joie perceptible.
Est-ce que l’on peut parler d’un disque concept dans le cas de «Don’t Panic? On retrouve bien des liens entre certaines pièces mais ils sont plutôt ténus. Pourriez-vous nous en dire plus?
John: Je dirais que c’est conceptuel mais ça ne raconte d’aucune façon une histoire. Le titre a été directement inspiré par le livre «The Hitchhiker’s Guide to the Galaxy». C’est une phrase clé dans le livre et je l’aime beaucoup. Donc lorsque nous avons composé «Don’t Panic» je n’ai pas pu résister. Je devais relier toutes les chansons à des idées portant sur la physique et la physique quantique. Elles ont effectivement toutes cette connexion entre elles.
Une pièce comme «Moment of Inertia» m’a vraiment surpris. Premièrement c’est une de vos rares pièces instrumentales et elle est vraiment aventureuse, un brin sombre.
John: Je crois que notre toute première longue pièce instrumentale a été «Evil Gnoma Su» de l’album «I Move» mais il est vrai qu’avec «Moment of Inertia» nous explorons d’autres avenues. Nous avions vraiment l’intention de briser un peu notre moule musical avec «Don’t Panic». Nous voulions essayer des choses différentes et cette pièce est née d’une improvisation de Tom, Greg et moi. Nous l’avons entièrement créé à partir de notre improvisation. C’était une façon cool et intéressante de composer .
J’aime beaucoup l’épique «42». Il me semble que vous poussez plus loin l’exploration avec cette pièce.
John : Je suis très fier de cette chanson. Tom et moi avons commencé à l’écrire il y a deux ans. Je racontais à Tom que j’avais une ligne de basse qui mériterait que l’on travaille dessus. C’est la première ligne que vous entendez dans la chanson. Je l’aimais vraiment beaucoup et je voulais créer une chanson à partir de cette ligne. Tom et moi avons souvent travaillé sur «42» et à chaque fois nous y ajoutions une nouvelle section. Lorsque que nous avons commencé à écrire les paroles j’avais en tête l’histoire de Jackie Robinson, le premier afro américain à avoir joué dans la Ligue majeure de baseball. C’est à cette histoire que je pensais lorsque j’écrivais les paroles. Après avoir fini la pièce je me suis mis à penser au numéro 42 qui était le numéro de l’uniforme de Jackie Robinson avec les Dodgers de Brooklyn et aussi au livre «The Hitchhiker’s Guide to the Galaxy» de Douglas Adams. Le numéro 42 joue un rôle significatif dans ce livre. J’ai donc décidé de connecter les deux idées.
À la première écoute j’ai eu l’impression que les connexions avec Yes étaient, comment dire, plus évidentes. Notamment en ce qui concerne la basse. Suis-je dans l’erreur?
John :Oui on retrouve énormément d’harmonies vocales denses et intéressantes sur ce disque. C’est voulu. Je me suis dit : «Nous avons quatre chanteurs nous devrions alors toujours les utiliser!» Et il s’est avéré que ce choix sur le plan des harmonies vocales a fait que ce disque sonne , je crois, un peu «à la Yes» . En ce qui concerne la basse j’ai consciemment fait un effort pour ne pas me censurer, de ne pas trop m’en faire si je sonne comme Chris Squire. Dans le passé je faisais toujours attention pour ne pas trop jouer dans son style, comme si je l’imitais. Mais depuis son décès je suis plus ouvert à l’idée de souligner ce que j’aime et j’apprécie de son jeu et de son son. Je ne m’en fais plus si les gens pensent que je l’imite. Son héritage doit être honoré et j’espère que je contribue un petit peu à l’honorer.
Je crois Tom que pour cet album John et vous avez adopté une nouvelle façon de composer. C’est-à-dire de composer ensemble. Est-ce que l’essai a été concluant?
Tom : C’est assez amusant mais John et moi avons très rarement eu l’idée de composer spontanément ensemble une chanson. Habituellement un d’entre nous arrive avec une idée ou parfois avec une chanson presque complétée et nous la présentons à l’autre. Ça été une nouvelle expérience pour nous en ce qui concerne la composition et nous allons définitivement retravailler de cette façon. Parce que nous sommes frères nous avons tendance à deviner ce que l’autre peut penser en terme de musique. Il y a un fort lien entre nous et je pense que le fait de composer ensemble a renforcé ce lien. Lorsque John m’a raconté qu’il voulait composer une pièce portant sur Jackie Robinson je n’étais pas certain que c’était une bonne idée. Cependant l’un comme l’autre nous adorons le baseball et nous sommes en admiration devant ce que Jackie Robinson a accompli. Il y a plusieurs livres et plusieurs films qui portent sur lui. Probablement trop pour les compter. Cependant, vous pouvez être certain qu’il n’y a aucune autre chanson progressive portant sur ce grand homme! L’idée générale de l’album c’est présenter par elle-même. Elle est reliée au nombre 42. Je me rappelle que John me disait que le numéro 42 était le «chiffre parfait». Je ne suis pas un gars versé en math et pour être franc je ne sais pas trop ce que ça veut dire. En ce qui concerne le thème de l’album je pense que pour moi la plus grande révélation a été l’idée de «Inertia». Quelques-uns d’entre nous ont fait des recherches sur ce mot tout en ignorant que les autres le faisaient. Lorsque nous avons découvert que l’équation pour le moment d’inertion était égal à IZZ nous avons été soufflés. Une fois de plus cela donne une nouvelle signification au nom du groupe. En fait si on regarde en arrière le titre de notre second album «I Move» est encore plus significatif. Il y a une corrélation entre le nom du groupe et le titre de l’album. Je trouve cela très intéressant et définitivement providentiel.