Lighthouse

Oak, c’est Simen V. Johannessen (chant, paroles, claviers), Ole M. Bjørndal (guitares), Øystein Sootholtet (basse, guitares, claviers, programmation) et Sigbjørn Reiakvam (batterie, percussions, programmation, claviers, guitares), épaulés par Henrik Skjervum (guitares), le jazzman Steinar Refsdal (saxophone) et nul autre que Bjørn Riis, guitariste de AIRBAG.
Lancé en format numérique en 2013 (année de formation du groupe), Lighthouse a été repris sur CD par Apollon Records en 2016. Initiative salutaire sans laquelle il serait passé inaperçu, ou presque. Fort bien écrits, les textes sont intimistes, nostalgiques, parfois amers: les amours perdus ou difficiles en forment le cœur. Pourtant, la musique n’est pas atmosphérique, mais énergique: pas «heavy» ou frénétiquement complexe, plutôt injectée de brillants éclats, tempos et ruptures multiples, mélodies bien tournées et jeux vocaux variés. Les 12 morceaux – 4 instrumentaux et 8 chansons (52 min) – de Lighthouse reposent sur le contraste entre paroles et musique, d’où une part de son originalité.
«Prelude» (1:14) – Instrumental. Clavier plaintif à tendance cosmique, quelques notes éparses de piano. Pièce étrange. «Home» (5:16) – Intro percutante en contraste total avec «Prelude» et la voix entre en jeu aussitôt, air entraînant où la basse et la batterie donnent le ton. Le rythme (batterie, basse, piano) faiblit peu, malgré les ruptures, puis amorce un crescendo, lent mais qui va en s’amplifiant même quand le chant reprend. Excellente chanson. «Perceiving Red» (6:24) – Intro au piano méditatif, écrin pour la voix, tout aussi méditative. Peu après, les claviers nappent presque la voix, puis s’atténuent devant la basse, mais les claviers reviennent en force, appuyés par la batterie, tandis que le chant persiste, mais quasi enfoui sous la musique. Rupture, tempo accéléré, mais avec modération, et toujours la voix dissimulée sous la rythmique et les claviers. Nouveau crescendo, assez aérien cette fois. Finale au piano. Belle pièce d’architecture. «Munich» (4:32) – Ballade qui emprunte à la pop, au rock et au «lounge». Mélodie émaillée de sonorités et percussions diverses lui ajoutant relief et densité. À mi-chemin, le rock prend le dessus, un peu à la façon West Coast, puis rupture et enchaînement au piano répétitif, jusqu’à ce que le duo batterie/basse vienne tout propulser sur un rythme industriel que les claviers et les guitares accélèrent en spirale. Nouvelle rupture comblée par le piano. Oak possède d’étonnantes ressources. «Stars Under Water» (5:22) – Intro acoustique, puis la voix récite avec des effets de distorsion qui se muent en chœur avec les autres instruments. Tempo moyen et entraînant, puis rupture et bref retour de la guitare acoustique. Nouvelle spirale instrumentale, quasi psychédélique. Travail vocal excellent et orchestration très riche. «Interlude 1» (1:17) – Instrumental minimaliste, percussions et claviers méditatifs.«The Sea» (8:36) – Piano solo grave puis, après 1 min, tempo de ballade «lounge» et voix conséquente. Les paroles sont terminées 2 min 30 sec plus tard, puis ce sont des passages de guitare acoustique et des ambiances plutôt mélancoliques, qui cèdent la place à des bruitages et aux claviers: grandes vagues lentes, denses, parfois stridentes, qui viennent s’écheveler sur des récifs. En finale, la guitare acoustique joue un motif apparenté à celui de l’intro. «Fire Walk With Me!» (6:20) – Ballade mi-folk, mi-rock, dominée par la voix et le piano. Contraste entre la voix un peu étouffée et la clarté des instruments. Encore une fois, les arrangements sont étincelants. «Interlude 2» (0:57) – Instrumental apparenté au précédent, mais sans percussions. «Where Did the Summer Go» (3:12) – Piano, échos, chant avec le duo basse/batterie en fond, d’abord discret, puis à l’avant-plan. Finale nostalgique, mais sans tristesse, aux claviers. «Lighthouse» (4:48) – Attaque instrumentale sur tempo un peu vif, puis la voix dérive bientôt vers un air de Broadway, mais avec percussions et effets sonores: résultat très séduisant, lumineux. Excellent solo de Skjervum. «Postludium – Walk of Atonement» (4:03) – Instrumental mêlant orgue religieux et échos de guitare, puis la basse et la batterie structurent les nappes sonores qui se superposent. Pièce assez cinématographique.
Donc, Lighthouse: à découvrir, parce que Oak offre une facette assez rare du prog norvégien: vive et entraînante plutôt que sombre et dramatique, malgré quelques voiles de nostalgie qui flottent ici et là.