+4626 - Comfortzone

Pays : Suède
Année : 2015
Production : Inside Out
Depuis la parution en 2007 et 2008 des deux parties de «Sleeping In Traffic», les réalisations de Beardfish sont attendues impatiemment par un public grandissant. Bien que la formation suédoise ne déroge jamais beaucoup à sa formule éclectique qui puise autant dans le progressif seventies que dans des styles plus modernes, elle nous a un peu désorientés en 2012 avec la sortie du controversé «The Void». Ce dernier confirmait une orientation amorcée en 2009 vers un style plus direct avec des titres résolument hard rock placés en ouverture pour bien faire comprendre la chose. Il y a lieu de penser que cette volonté d’élargir son champ d’action vers un nouveau public n’a pas été satisfaisante pour les suédois parce que +4626 Comfortzone est un retour sans équivoque à des sonorités plus familières où les claviers ont repris une place conséquente. Il y a bien deux brûlots comme «King» et sa rythmique plombée et surtout «Daughter / Whore» qui sent un peu le Metallica de «Kill’Em All» mais ces deux pièces ne représentent qu’onze minutes sur les 65 de l’album.
On retiendra donc prioritairement les trois pièces les plus longues qui donnent la direction de l’album. Avec «Hold On» (7:47), on retrouve la voix familière de Rikard Sjöblom qui chante, murmure ou crie avec la sensibilité qu’on lui connait. La plus nuancée «Comfort Zone» (9:34) débute par une mélodie à la guitare électrique accompagnée d’arpèges de piano. Mais la pièce maitresse de l’œuvre est selon moi «If We Must Be Apart (A Love Story Continued» (15 :34) qui est dominée par un orgue Hammond omniprésent. Sjöblom excelle au B3, c’est connu mais je ne crois pas qu’il ait déjà mieux exploité cet instrument. Sur une note plus humoristique, la dynamique «Ode to the Rock 'N' Roller» (7:20) qui porte assez bien son titre et fait penser à du Frank Zappa. Pour donner un air de concept à cette collection de pièces remarquables, Beardfish a placé en début, milieu et fin, la pièce «The One Inside» en trois parties. Le thème est d’abord joué façon orchestrale en ouverture, folk à la guitare acoustique au milieu et finalement sous la forme d’une balade rock pour clore le disque. Beaucoup plus consensuel que son prédécesseur, «+4626 – Comfortzone» est une réussite totale qui replace Beardfish dans le peloton de tête des formations progressives actuelles.
Le deuxième CD est intitulé «The Early Years Outtakes And Demos (2002 - 2008)» et il contient, comme son titre le laisse entendre, des pièces d’anthologie enregistrées en cours de carrière et qui n’ont pas été retenues sur un album ou des compositions ayant été utilisées partiellement. Même si ce disque bonus n’est pas mentionné au dos du boitier, il bénéficie d’un deuxième livret qui donne d’ailleurs beaucoup d’informations sur les sessions d’enregistrement d’où sont issues ces morceaux. On découvre ainsi qu’en plus de Zappa qui a exercé une influence majeure sur Rikard Sjöblom, King Crimson et Gentle Giant ont également été importants pour le musicien. Certaines pièces présentées ici ont été volontairement enregistrées dans cet esprit alors que d’autres ont été écartées parce qu’elles trahissaient de façon trop évidente leur origine. «Sun Down», par exemple est une très (trop) proche parente de «I Lost my Head» du doux géant alors que «Luminaire» fait penser à «Frame by Frame» (King Crimson) par moments.
Dans l’ensemble, ça s’écoute très bien et on aurait pu en faire un album autonome qui se serait adressé prioritairement aux fans. Il s’agit donc d’un cadeau appréciable que Beardfish fait à ses supporteurs comme il l’avait fait avec le DVD accompagnant «Mammoth».
En juillet 2016, le groupe s'est dissout.